Le hip-hop, une danse « thérapeutique » pour nos ados

Publié le : 24 janvier 20196 mins de lecture

Plus qu’un sport, la danse hip-hop se révèle être une discipline idéale pour les ados, fascinés par le visuel, l’apparence et, parfois, en pleine rébellion. Rencontre avec Jessica Noita, danseuse professionnelle, art-thérapeuthe et professeur de danse auprès d’adolescents. Elle nous explique les bienfaits de cet art, que les parents n’associent souvent -à tord- qu’à une danse de rue…

A partir de quel âge les parents peuvent inscrire leur enfant à la danse hip-hop ?

Les enfants peuvent commencer dès 6 ans. Mais à cet âge, il s’agira davantage d’éveil corporel. En effet, on évite d’initier les plus jeunes au break (techniques au sol) qui peut être dangereux pour la croissance de l’enfant. Cependant, dans la réalité, les jeunes commencent de plus en plus tôt, parfois sans enseignement, en reproduisant ce qu’ils voient sur des vidéos. Mais le mieux serait de commencer le break aux alentours de 14 ans. A ce stade, les adolescents ont une meilleure connaissance de leur corps et auront donc une meilleure approche anatomique.

Vous avez aujourd’hui 34 ans. A quel âge avez-vous commencé le hip-hop ?

J’ai commencé à l’âge de 12 ans après avoir pratiqué durant six années la danse classique puis contemporaine.

Qu’est-ce que le hip-hop vous a apporté de plus ?

En fait, dès que j’ai essayé cette danse, je me suis tout de suite identifiée à ce style. Il y a ce qu’on appelle le « groove », une pulsation de l’ordre du primitif et un feeling que je n’avais pas trouvé dans le classique ou le contemporain.

Quels sont les bienfaits de cette danse chez les pré-ados et ados ?

L’adolescence, c’est la période où le paraître prend de l’importance pour les enfants. Les jeunes sont très vite fascinés par le hip-hop, qui est très visuel. C’est idéal pour leur faire découvrir cette discipline. Ils sont très vite dans le mimétisme et sont rapidement accrochés.  Cela crée une cohésion entre le professeur et les élèves : de la forme, on les amène vers le fond. Et puis, c’est une discipline récréative, non pas qu’il n’y ait pas de rigueur, mais cette danse les captivent rapidement, notamment les adolescents turbulents. Ce sport est aussi idéal pour les jeunes complexés. Il n’y a pas ce côté érotisant, ce rapport aux corps que l’on peut retrouver dans d’autres danses. En plus de cela, il y a dans le hip-hop quelque chose de thérapeutique.

C’est-à-dire ?

Cette danse peut être favorable aux jeunes en rébellion, qui ont besoin d’un exutoire, d’exister à travers quelque chose. Ils peuvent libérer toute cette énergie primitive de façon artistique comme s’il y avait une urgence d’exister. Afrika Bambaata a inventé la danse hip-hop après que l’un de ses amis ait été tué dans une rixe, autour de trois concepts : peace-love and having fun. Toute la danse hip-hop repose là-dessus. Lors des battles (bataille de danse) par exemple, il y a aussi le surpassement de soi, tout se passe dans l’espace scénique (provocations, colère) tout en ayant un certain respect de l’autre. On interprète un rôle, on se confronte à l’autre sans le toucher.

Que diriez-vous aux parents qui estiment que la danse hip-hop n’est qu’une danse de rue ?

Je dirais simplement qu’il s’agit d’une véritable méconnaissance. Il faut dire que la télé n’est pas toujours représentative de la réalité de la danse hip-hop. On met souvent que le visuel en avant, mais pas la technique, le créatif.

Et aux parents qui estiment que la danse ne s’adresse pas aux garçons ?

Le hip-hop est la danse la plus mixte qui soit. C’est une danse née dans un univers masculin. Au fur et à mesure, les filles se sont appropriées à cette discipline.

Peut-on avoir aussi bien faire carrière dans le hip-hop que dans le classique ?

Ce n’est pas le même chemin. Pour le classique, la sélection se fait beaucoup plus jeune et la compétition aussi. Pour le hip-hop, tout se fait sur le tard, et le réseau joue beaucoup. Sans compter que le salaire est vraiment différent. Un danseur classique gagne beaucoup mieux sa vie qu’un danseur de hip-hop !

Quels conseils donneriez-vous aux parents dont les ados souhaitent se lancer dans ce type de carrières ?

Il faut déjà dire aux ados d’être polyvalents. Le milieu est très petit, il faut s’ouvrir aux autres danses, contemporaine notamment. Les parents et adolescents doivent également être vigilants. La professionnalisation en danse hip-hop n’est pas une fin en soi, et le statut est parfois précaire. Il est donc important de continuer les études sans perdre de vue son rêve, ses ambitions et aux parents d’encourager leurs enfants dans cette démarche.

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